Vénus

La fascination découlant des questionnements autour des origines est profonde et reste entière. L'éveil intellectuel de "l'homme qui pense" reste intimement lié à ses créations les plus anciennes.

Ces statuettes en ivoire, calcaire, stéatite, os, argile... nées il y a environ 30000 ans, appelées faussement "Vénus", restent aujourd'hui encore auréolées de mystère. Elles exercent une fascination liée à notre incapacité à savoir réellement qui les a créées et pourquoi.

Comment a-t-il été possible, à une époque sans communication à très haut débit, qu'un même esprit fédérateur ait guidé leurs créatrices et créateurs vers de telles similitudes formelles? Un groupe d'artistes et/ou d'intellectuels homo sapiens se serait il rassemblé en secret, au fond d'une grotte pour créer le mouvement du "Paléologisme"?

Aucun lieu en Europe, de la Russie à l'Espagne n'a pourtant été oublié.

Le mystère excite la curiosité et la créativité.

Pures œuvres d'art? Objets de culte? La fascination se renforce encore par notre incapacité à préciser si elles étaient le fruit d'une simple envie créatrice, ou pourvues de fonctions spécifiques, pédagogiques, magiques, spirituelles, chamaniques, ludiques…

Quant à leur apparence? La pureté des lignes de "La dame à la capuche, Vénus de Brassempouy" (-21000 ans), la douce sensualité qui s'en dégage projette cette plus ancienne représentation d'un visage en ronde-bosse, au rang d'œuvre d'art total. Le degré d'abstraction qu'elle incarne, de part les choix esthétiques de son créateur, l'affranchit de l'emprise de la nature. Les omissions morphologiques volontaires poussent à exacerber ses détails, aussi "simples" soient ils, pour en faire un chef d'œuvre.

fasciné par les cultures premières, par ce que le primitivisme dans l'histoire de l'art nous a légué, mon travail a consisté à réaliser une série de "Vénus", sculptées dans divers matériaux. Chacune posée sur un piédestal également différent. Ce dernier, manufacturé, objet d'un quotidien parfois sorti du passé, patiné par le temps, la main de l'homme ou la nature, recentre notre regard et notre questionnement autour de la fonctionnalité de l'objet autant que de l'œuvre d'art.

Sortes de curiosités extraites du cabinet de mon imagination sensible à cet héritage, elles sont présentées sous globe de verre. Un globe, partie intégrante de l'œuvre, qui est en fait le verre détourné d'une ampoule. Pour ne pas oublier, non sans humour, qu'au delà de la désuétude dans laquelle sont parfois exposés certains de ces chef d'œuvres, ils incarnent peut être la meilleure idée que l'homme ou la femme créant n'ait jamais eu.